Le mal est obscur et aveugle, il frappe indifféremment les bons comme les mauvais, et à tous, il leur cause de la souffrance. Mais comme celle-ci est personnelle, c'est à chacun d'y réagir à sa manière. Pour moi, Jésus est "le Chemin, la Vérité et la Vie" (Jn 14,6), je choisis donc de contempler l'attitude de Jésus dans la souffrance et d'essayer de l'appliquer pour moi. Je vois que Jésus n'accepte nullement la souffrance, il demande à son Père: "Mon Père, s'il est possible, que cette coupe s'éloigne de moi!". Mais il s'abandonne ensuite immédiatement à lui: "Toutefois, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux." (Mt 26,39). Ainsi, la souffrance est à soulager et à bannir. Je ne dois pas la vouloir comme moyen de purification ou de salut. Qu'elle ne me fasse pas non plus douter de Dieu, ni de son amour, bien que, dans un moment de détresse bien humain, je puisse crier comme Jésus sur la Croix: "Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?" (Mc 15,34). Cependant, il faut bien voir que le dernier mot de Jésus exprime son abandon total au Père: "Père, entre tes mains, je remets mon esprit" (Lc 23, 46). La souffrance est le moment où je dois livrer un combat contre le mal, c'est donc le moment où Dieu, mon Père, est le plus près de moi à veiller et attendre que, librement, je l'appelle à mon secours pour accourir vers moi. La souffrance est donc l'occasion par excellence de témoigner ma foi envers Lui, et c'est par ma confiance et mon abandon à Dieu que je suis sauvée, non par la souffrance, qui n'a aucun pouvoir de rachat. Car je ne peux pas croire non plus que Dieu veut faire souffrir son Fils pour racheter nos péchés. C'est l'obéissance absolue du Fils au Père jusqu'à la mort, malgré les cruautés subies, qui répare la désobéissance originelle.
Néanmoins, comme l'a affirmé Saint Paul, tout "concourt au bien de ceux qui aiment Dieu" (Rm 8, 28), y compris la souffrance. En effet, la souffrance me déstabilise, et en me rendant ainsi consciente que je ne peux me fier sur rien, ni sur personne, elle me fait tourner davantage vers Dieu. La souffrance me met également à nu, je ne peux plus porter de masques dont je me suis servi pour me protéger. N'ayant plus peur d'être démasquée, je peux venir ainsi plus facilement vers les autres. Sans masque, ma relation avec eux est aussi plus sincère et authentique. La souffrance me révèle aussi ma pauvreté et ma vulnérabilité, par conséquent, je deviens plus humble, je ne suis plus ce sol dur, impénétrable, mais le sol que la souffrance a travaillé, retourné, labouré de long en large pour qu'il puisse recevoir de nouvelles semences de vie, je m'enrichis ainsi spirituellement. Dès lors, je comprends mieux les promesses que Jésus nous a faites à travers les Béatitudes, si contradictoires avec les perceptions du monde sur le bonheur: "Heureux les pauvres… Heureux les affligés… Heureux les persécutés…"
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